Friday, September 5, 2014

Démission de Léon Nzouba : A-t-on changé de régime?

Le déroulement actuel et probable des événements laisse croire à un changement du mode de fonctionnement de l’Etat.


L’opinion hésite, de toute évidence, sur le sens à donner à la démission de Léon Nzouba. Elle croit en revanche qu’une nouvelle phase du mandat d’Ali Bongo vient de s’ouvrir. Se référant à l’alinéa 3 de l’article 15 de la Constitution, de nombreux observateurs ne comprennent pas très bien que le désormais ancien ministre de l’Education nationale ait présenté sa lettre de démission au Premier ministre et que l’opinion en ait été informée par le porte-parole du gouvernement, qui n’a même pas pris la peine de présenter la lettre du démissionnaire. L’exécutif doit clarifier cette situation, faute de quoi l’opinion y verrait une nouvelle marque de cet «amateurisme», cette «incompétence» tant décriés depuis 5 ans bientôt.
Les raisons de cette démission semblent en revanche limpides. Il fallait donner une tête et faire un sacrifice à titre symbolique ou expiatoire afin de ne pas cautionner cette idée que l’exécutif est en train de liquider notre système éducatif et, pourquoi pas, faire tomber la pression voire obtenir davantage de compréhension de la part des lycéens grévistes de la faim. Rien de surprenant quand on revient sur la valse des ministres à laquelle nous avons droit depuis 2009. Mais il y a quelque chose de sous-jacent dans ces événements. Alors que Léon Nzouba était présenté comme un très proche voire un intime du président de la République, ce dernier s’est contenté de «prendre acte» de sa démission quand il lui appartenait de l’accepter ou la refuser. Certes on pourra toujours évoquer le fait que le Premier ministre est le chef du gouvernement. Certes on pourra gloser sur un certain conformisme et la gravité de la situation. Mais, jusqu’à preuve du contraire, c’est encore le président de la République qui «nomme» et «met fin» aux fonctions des membres du gouvernement. Railleries, moqueries, interrogations : une fois encore, l’opinion s’interroge sur les modes de faire de l’exécutif et sa capacité à respecter les règles établies. Bien entendu, l’opinion peut se montrer un peu moins pointilleuse. Mais, peut-on gouverner en dehors de la loi, en prenant quasi-systématiquement des libertés avec elle ?
Ali Bongo doit donc adresser un « signal fort » pour montrer qu’il peut se conformer à la règle. Pour cela 2 voies s’offrent à lui : ou il remplace poste pour poste Léon Nzouba sans rien toucher de plus, ou il révoque puis renomme son Premier ministre avant de procéder à une redistribution des cartes au sein du gouvernement. Empruntera-t-il l’un ou l’autre de ces chemins ? Rien n’est moins sûr… Mais le déroulement des événements confirmera ou non le caractère critique et heurté des relations entre la Primature et la présidence de la République durant le mandat en cours. Après l’imbroglio ayant conduit au remplacement de Paul Biyoghé Mba puis la tragi-comédie ayant débouché sur la composition de l’actuel gouvernement, l’opinion a besoin d’être rassurée. Autrefois tenus pour des faire-valoir, des figurants, les Premier ministres sont aujourd’hui présentés comme des marionnettes. Avant, les Premiers ministres étaient faibles, mais les ministres avaient, pour la plupart du pouvoir. Aujourd’hui ni l’un ni les autres n’existent face à la multiplicité d’établissements publics et au cabinet du président de la République
Modernisation, recherche d’efficacité ? Tout ceci ressemble à de faux fuyants, des excuses peu convaincantes dans un régime semi-présidentiel. Présidentialisation ? A coup sûr !!! La question de fond qui se pose désormais est simple : nos gouvernants actuels arriveront-ils un jour à habiter leurs fonctions ? La Constitution est-elle une contrainte ou un instrument au service de la liberté, du vivre-ensemble ? La loi relève-t-elle du superflu ou de la nécessité ? Est-ce perdre du temps que de la respecter ? Est-ce faire preuve de faiblesse que de laisser chacun jouer pleinement son rôle ? Le Gabon s’est accommodé, bon an mal an, d’un régime semi-présidentiel. Peut-il aller sur les sentiers de l’avenir avec un régime présidentiel de fait, qui plus est non assumée ? Peut-il construire son avenir avec un régime parlementaire qui ne reconnaît cependant au Premier ministre aucun pouvoir réel, si ce n’est celui de faire le sale boulot et prendre les coups ? Si le gouvernement est recomposé, remanié au-delà du seul ministère de l’Education nationale sans que le Premier ministre n’ait préalablement démissionné, notre pays sera définitivement passé du régime semi-présidentiel à un régime inconnu, une sorte d’avatar du présidentialisme à géométrie variable, sans règles précises. En somme, nous serions alors définitivement entrés dans un régime politique non identifié…

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